Je me suis fait un cœur de pierre
pour ne plus souffrir.
Je l’ai refermé avec une clef
que je garde éloignée de ma peine
entre deux livres serrée
sur une étagère.
Mais je sens déjà poindre en moi
le bourgeon d’une fleur
ouverte aux affres de la vie
offerte gracile à l’hiver.
Et la pierre de s’ouvrir
lentement, mais sûrement
au gel du crépuscule
sous le regard impuissant
de Lune mon amie.
Le bois s’enflamme dans la cheminée,
brûle dans le soir
brûle mon cœur
de peine froissé.
Mon cœur n’est pas de pierre
mes larmes sont d’amour
et la fleur à peine née
se meurt au cœur de la pierre
écartelée.
À quoi sert cette clef
puisque le froid m’ébranle le cœur ?
À quoi sert la vie
sinon à souffrir ?
À quoi sert donc l’amour
puisqu’au jour le jour
il détruit…
Le bois s’enflamme dans la cheminée,
brûle dans le soir
brûle mon cœur
de peine froissé.
Mon cœur est de papier,
fébrile il se consume
sur le bûcher du désamour.
Il n’est plus d’espérance
il n’est plus que cette souffrance
qui se répand en cendres
dans l’âtre de la vie.
Je m’étais fait un cœur de pierre
pour ne plus souffrir.
Je l’avais refermé avec une clef
que je gardais éloignée de ma peine,
mais c’était sans compter
sur l’hiver, le gel éternel
du désamour
qui détruit les âmes tendres.
Cœur de papier,
papier froissé
qui se consume
dans l’infortune du soir,
cœur fragilisé
pour avoir trop aimé…
© Monique-Marie Ihry – 10 novembre 2016 –
(Illustration de l’auteure : « Baiser volé » (2015) – Huile sur toile 41 x 33 cm –