Aurore 

 

Les arbres nus, les massifs en fleurs,

la rose, l’oiseau,

tout renaissait dans la brume.

La nuit et ses cendres tiraient leur révérence

au jour dans le chant d’une aurore …

 

©  Monique-Marie Ihry    –  2012  –

 

* * *

 

“Dans ce haïku, le mot  « jour »  est le mot-clé ou plus précisément le focus  au sens pragmatique du terme, bien qu’il ait été mentionné au dernier vers. Et ce retardement est, sans aucun doute, délibéré et calculé afin d’exploiter le plus grand nombre d’éléments linguistiques utilisés  précédemment  pour  bien  le mettre en évidence, vu que le texte a été construit spécialement autour de lui.

Commençons donc par examiner les significations  de ce mot pour comprendre  dans quel but il a été retardé. Le jour  est l’un des symboles de la masculinité,  d’où les notions de vivacité, d’activité, d’intrusion, de clarté  et d’amour déclaré  qui lui sont  associées. Dans ce haïku-ci,  on le voit prendre la place de  son contraire « la nuit » qui représente la féminité avec la plupart de ses caractéristiques notamment la passivité, la réceptivité, l’intuitivité et l’amour secret. Néanmoins, cette passation n’est pas directe car elle a été accomplie après une phase intermédiaire, le temps relativement bref que dure  l’aube. Et cette phase est loin  d’être superflue parce qu’elle évoque une période marquée par le doute, la suspicion et la méfiance  qui sont des états d’âme presque propres aux femmes dans leur relation avec le sexe opposé. Enfin, si la succession de ces trois étapes (nuit – aube – jour) connote  effectivement une évolution positive et heureuse, il est à remarquer que l’on est  encore seulement au lever du jour. Ce qui veut dire qu’il reste un bon trajet à parcourir. Espérons que  la prochaine  étape confirmera tout l’optimisme affiché par la locutrice  en couronnant son poème par le lever du jour.”

 

Mohamed Salah Ben Amor